Le département de la Guajira
Superficie 20 848 km2, les 2/3 de la péninsule Bretonne en France.
Un peu plus d’1 million d’habitants dont près de 500 000 sont Wayüu, un peuple autochtone.
Avec le département du Choco, situé sur la côte Pacifique, la Guajra est le département le plus pauvre de Colombie, soumis à la corruption et au clientélisme ainsi qu’à l’abandon par l’État.
Au sud-ouest, la Sierra Nevada de Santa Marta culmine à 5 775m. Elle est peuplée par les peuples Koguis, Arhuacos, Kuankuamos, Tayronas et Wiwas. Elle est l’immense source d’eau pour toutes les villes et villages qui l’entourent mais en danger d’extinction de ses ressources glacières d’altitude.
Au sud-est, le département du César et sa capitale Valledupar.
La basse Guajira, territoire fertile, est au pied de la sierra Nevada et ses contreforts. Près des petites villes Fonseca et San Juan se trouve l’immense mine de charbon à ciel ouvert, El Cerrejon qui capte en grande partie l’eau de la seule rivière permanente de la Guajira, le rio Rancheria et ses affluents, ainsi que les nappes phréatiques. Elle est cause de déviations de cours d’eau, de déforestations, de contamination des sols et de l’eau, d’accaparements de terres.
La moyenne Guajira, avec la ville de Riohacha, est un territoire semi-désertique qui s’étend jusqu’à Uribia, la ville dite des Wayüu, bien qu’elle fut dessinée et largement construite par les jésuites au début du XXe siècle. Le rio Rancheria traverse la basse et moyenne Guajira d’est en ouest et se jette dans la mer à Riohacha. Le sous-sol regorge de charbon et de pétrole. A l’est Maicao, la ville en frontière avec le Vénézuéla, est le grand bazar des échanges et des trafics de toutes sortes, ville dangereuse, ville frontière "à haute intensité".
La haute Guajira s’étend jusqu’à l’extrême pointe nord. C’est un désert totalement aride, hormis la petite chaine de montagnes à la pointe et la petite ville de Nazareth qui composent un vaste oasis. Cabo de Vela, avec ses plages et son promontoire est visitée par les touristes, de même la Punta Gallina tout au bout du bout du nord. Ce vaste désert, malgré ses conditions de vie extrêmes, est pourtant habité par des communautés wayüu.
Photos L. Bernhardt
Les Wayüu
Le peuple autochtone le plus important en nombre de Colombie ainsi qu’au Vénézuéla.
Un peuple dont la langue, le wayuunaiki, fait partie des langues arawak originaires de l’Amazonie. Depuis les années 80, l’enseignement scolaire se fait dans les deux langues, le wayuunaiki et l’espagnol.
A l’origine nomade, il vit principalement de l’élevage de chèvres et de vaches, élevage qu’ils ont appris des Espagnols sans que ceux-ci n’aient jamais pu les conquérir.
Il est composé d’environs une quarantaine de clans. La société est matrilinéaire : un système de filiation dans lequel chacun relève du lignage de sa mère. La transmission de la propriété, des noms de famille et des titres, mais aussi des traditions et DES coutumes, passe par le lignage féminin. Le pouvoir politique est tenu par les hommes.
De par sa composition clanique, la société Wayuu n’a pas de chef ou de représentant : chaque rancheria a sa propre « autorité », généralement le grand-père ou grand-oncle, et son ou sa « leader » qui fait l’interface entre la communauté et les instances locales et départementales mais qui dépend directement de « l’autorité ».
Leur système judiciaire, basé sur la recherche d’un compromis pour laver le préjudice subi, est entré en 2010 au patrimoine culturel mondial. Il s’applique pour toute affaire interne à la communauté ou entre deux communautés.
La cosmovision wayuu parle d’un esprit créateur, Maleiwa, d’un esprit de la pluie, Juyà, esprit masculin qui a donné naissance aux plantes et aux hommes, et d’un esprit de la terre, Pulowi, esprit féminin lié à la terre, à la sécheresse et aux vents. Il est aussi une multitude d’autres esprits liés aux animaux et aux humains morts et ancêtres. Ils peuvent intervenir dans la vie de chacun et il convient de s’en protéger.
Le rêve prédictif a une grande importance. A la limite du lever du jour, autour d’un petit feu, on se raconte en famille les rêves de la nuit. Ils permettent de prévoir un accident ou un danger qui peut survenir.
Après avoir effectué le double enterrement, espacé de plusieurs années sur le premier, les os du défunt sont portés à l‘extrême nord de la péninsule. Alors seulement, le défunt quitte le monde des vivants pour rejoindre Jepira, dans la voie lactée, le lieu de tous les délices qui ont manqué sur terre : la nourriture en abondance, le sexe en liberté.
La rancheria Cachaca III
Pour des photos de la Cachaca III, voir tous les autres articles de la rubrique 2 qui portent sur cette rancheria
Une rancheria est un territoire de vie et d’habitat, elle est occupée par une communauté wayuu, les animaux domestiques (chèvres, vaches pour les rancherias de l’intérieur, cochons, poules qui y vivent en liberté sauf la nuit en enclos), une mare naturelle dite jaguëy, des espaces naturels.
La Cachaca III est située en bord immédiat de la mer, à 8km à vol d’oiseau au sud-ouest de Riohacha.
160 personnes, adultes et enfants, y vivent en 20 familles cellulaires. "L’autorité" est le plus âgé, Pedro 84 ans, avec sa femme Carmen, 79 ans. Elle a transmis son nom à ses enfants : Fonseca. Ils ont 56 petits-enfants et arrière-petits-enfants. Clarena est la "leader".
L’activité alimentaire et économique repose sur la pêche en mer, une agriculture très saisonnière (les deux saisons des pluies), depuis peu l’agriculture familiale, l’artisanat.
Nous les avons rencontré en mars 2013. Depuis, une longue aventure d’amitiés et de collaborations s’est développée.
Photos de Gustaff Bolinder, Wayüu datant du début du siècle
Photos l. Bernhardt, fabrication de mochilas, Cachaca III
La première et vitale lutte du peuple wayuu